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Laura Sanchez Filomeno – Île MoulinSart – Cultur'elles
work in progress, Laura Sanchez

Laura Sanchez Filomeno – Île MoulinSart

La plasticienne franco-péruvienne utilise un élément pas comme les autres … les cheveux !


Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? Quel est votre parcours ?
Je suis une artiste plasticienne franco – péruvienne, j’utilise des cheveux comme matière première et puise mon inspiration dans les encyclopédies anciennes et les cabinets de curiosités. J’ai obtenu mon diplôme en Arts Plastiques avec la mention Peinture en 1998 à la faculté d’Arts Plastiques de la PUCP (Pontificia Universidad Católica) à Lima- Pérou. Après avoir travaillé dans mon atelier à Lima pendant quelques années, je suis venue en France pour poursuivre mes études en 2002 et j’y suis restée. J’ai obtenu le D.N.S.E.P Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique à l’école Supérieure des Beaux-arts du Mans (en 2004), une Maîtrise en 2005 et le Master II en 2006 en Arts Plastiques et Sciences de L’Art à l’Université Paris I Panthéon- Sorbonne. J’ai poursuivi avec le doctorat, que j’ai obtenu avec ma thèse « Naturalia-artificialia, l’art baroque mis en œuvre dans une pratique artistique contemporaine ».

J’ai remporté le prix Artistique 2018 de l’ENS de Cachan et la Mention et le prix acquisition ASM à la Biennale Contextile, Portugal (2016). J’ai été l’artiste invitée de Détissages/Cooksonia à la Maison Tadashi Kawamata – St-Thélo ( 2017).  J’ai aussi remporté le Prix de la Mairie de Paris au sein du festival « Ici et Demain 2007 » dans la catégorie Arts plastiques avec le projet «Topographie du corps».

Je suis une artiste pluridisciplinaire, dans mon œuvre différents concepts se mêlent comme un tissage, démontrant mon dessein d’explorer des questionnements qui sont à la fois paradoxaux et complémentaires, de voir les deux « côtés du miroir » comme celui de l’attirance et de la répulsion, le sublime et l’obscène, le sacré et le profane, qui reflètent le constat d’une dualité présente dans toute ma recherche plastique.

 


Votre travail s’inspire de la nature et de la science, quelles places occupent ces domaines dans votre vie ? Étaient-ils présents dans vos études ?
Dans mon travail, on trouve l’émerveillement face à la nature, elle est à la fois source d’inspiration mais aussi matière première. En récupérant quelque chose de jeté, rejeté et de résiduel, je donne à ces rebuts une nouvelle beauté, un nouveau sens. Ainsi ma réflexion s’oriente vers la recherche de la continuité entre la nature et l’art, naturalia et de artificialia.

Mes œuvres trouvent une source d’inspiration dans les encyclopédies anciennes et  les livres scientifiques de biologie moléculaire. Ma recherche plastique se nourrit de tous les champs des sciences, tant de la biologie qui nous renvoie à l’être humain, à son ADN avec l’utilisation des cheveux, mais aussi de la botanique et de la biologie.


Dans vos œuvres, vous utilisez beaucoup le fil, le tissu, la broderie, comment choisissez vous vos outils, vos matières ?
Dans mon œuvre j’utilise les cheveux comme on pourrait utiliser le crayon ou l’encre de chine. Chaque point brodé laisse une trace différente, comme un trait de dessin. En effet dans ma façon d’aborder cette technique, j’utilise des cheveux de différentes couleurs et épaisseurs. Mes cheveux foncés sont les traits noirs comme l’encre de chine, et les cheveux des autres m’apportent d’autres nuances de couleurs. Je sépare les cheveux par ton, comme un peintre fait sa palette de couleur.

Pour moi broder est dans la continuité de l’acte de dessiner ou de peindre. Je me suis réappropriée la technique de la broderie de façon intuitive sans connaissances techniques, elle est venue à moi de manière naturelle.

Dans mes broderies il n’a pas de point croix ou de chainette, je réalise mes pièces en répétant le même geste de base, de manière continue et répétitive, comme si l’aiguille devenait le prolongement même de ma main. La démarche du temps est pour moi alors différente du dessin, quand je brode les heures ne comptent pas.

 


Il y a des références aux cabinets de curiosité, à l’histoire de la botanique, quel rapport entretenez-vous avec l’histoire, le passé ?
Comme en archéologie, je fouille dans la mémoire, une mémoire anonyme et je cherche à récupérer cette mémoire perdue. Mon travail prend référence dans les différentes civilisations ancestrales,  le culte de la mort et l’enterrement, les momies, les techniques anciennes qui sont presque disparues.

Comme dans un musée, je classifie ma matière première. Cette classification, comme celle d’un cabinet de curiosités ou d’un musée d’histoire naturelle, relève autant du jeu d’enfants que des rituels.  Je m’intéresse aux collections, et chaque collection est un monde en miniature. La classification est dans mon œuvre une manière de cartographier la mémoire.

Dans mon investigation artistique, Je m’intéresse également aux collections et aux principes de classification et je m’attache à donner une volonté pour établir une contiguïté entre les deux registres du cabinet de curiosités : les naturalias – artificialias (les trésors de l’art et les merveilles de la nature, l’art dans ses manifestations les plus audacieuses et la nature dans ses formes les plus brutes), traversés chacun dans leur ordre par la catégorie du merveilleux.

Mon œuvre se nourrit du passé pour pouvoir se construire dans le futur, avec un regard vers la matrice humaine, les sciences, la biologie, l’ADN.


Comment s’est passé la préparation de cette exposition à Moulins’Art ? Connaissiez-vous la Sarthe ?
L’exposition que je présente au Centre d’art Ile MoulinSart s’appelle Compendium Naturae et va se dérouler du 6 septembre au 31 octobre 2019. Dans ce projet, je prends comme point d’origine la représentation des encyclopédies anciennes en réalisant un abrégé de la nature, une compilation et classification des espèces comme dans une sorte de constellation scientifique personnelle.

Cette exposition part avec l’idée d’un carnet scientifique qui s’inspire des herbiers et des planches anciennes qui représentent les merveilles de la nature.  Dans cette compilation, je fais un parallèle entre cet imaginaire encyclopédique et notre monde contemporain, avec l’inclusion de codes barres, des impressions des scans qui font un rappel à notre monde actuel où tout est codifié et recensé. En même temps, cette exposition est conçue comme un répertoire cartographique avec des objets hybrides qui dévoilent une frontière entre la nature et l’artifice.

Dans cette exposition je vais créer une œuvre inédite de grand format, où j’invite les habitants des communes alentours à participer à la création de cette œuvre, soit en faisant la donation de la matière première de cette pièce qui est composé des cheveux (il s’agit de récolter leurs cheveux qui tombent tous les jours et de les déposer dans les points de collecte prévus à cet effet) ou de participer à un atelier collectif en réalisant des « cocons » qui vont intégrer ensuite l’œuvre dans l’exposition. Cette œuvre sera un grand tissage, une construction rhizomatique, une accumulation, une construction d’éléments répétitifs, comme des organismes vivants. Cette œuvre, faite de « morceaux de gens », représentés par les cheveux, rassemblera ainsi différentes identités, différents ADN.

Grâce à cet atelier participatif, je souhaite faire une immersion dans mon processus de création qui aura pour but de pouvoir aborder le sujet sur le respect de l’environnement et sensibiliser à l’idée de la nature comme matière première.

La Sarthe est un département très cher pour moi. J’ai fait mes études à l’Ecole des Beaux Arts du Mans entre 2002 et 2004.


Quels sont vos rapports avec le public, les échanges, les interrogations ?
J’essaie de mener le spectateur à avoir une réaction physique intense en face de mon œuvre et vis-à-vis de ce à quoi il est confronté, à savoir la matière organique avec laquelle j’ai travaillé.  Cette matière organique est très familière et forme partie de notre vie quotidienne, mais sortie du contexte et transformée, elle devient surprenante.

Les gens ont des attitudes, des perceptions totalement différentes quand ils sont en face de mes œuvres, qui varient selon des comportements et des expériences physiques de chacun. Pour les uns, cette matière première, le cheveux devient répulsif par la manipulation, et pour d’autres, au contraire, le répulsif de la matière résiduelle devient précieux et attirant au travers du travail artistique.

Une de mes intentions, dans un premier temps, est que le spectateur ne reconnaisse pas cette broderie de cheveux. Face à cette broderie détournée, le spectateur manifeste, en général, une réaction intense entre fascination et rejet car l’emploi de cette matière première peut susciter un malaise, en contradiction avec le travail délicat et minutieux de mes broderies et sa préciosité.


Y a-t-il un message prédominant que vous souhaitez passer à travers vos productions ?
Mon travail invite le public à porter un nouveau regard sur les résidus, les déchets organiques, en leur attribuant une nouvelle beauté. Les actions de sensibilisation de l’atelier participatif vont permettre d’ouvrir des discussions à ce sujet.

Mes productions se trouvent comme un outil de communication pour sensibiliser les gens à notre environnement et invitent à prendre soin de ce qui nous entoure. La nature peut être envisagée en tant que source d’approvisionnement de matière première et comme un outil pour la création artistique avec tout le respect avec lequel on doit la considérer. Mon œuvre me permet de communiquer ma sensibilité envers des matières résiduelles qui sont communément rejetées dans notre société.


Quels seraient vos derniers coups de cœur artistiques ? Et/ou les artistes qui vous inspirent, contemporains ou non…
Mon dernier coup de cœur artistique c’est Tomas Saraceno, avec son exposition On Air au Palais de Tokyo, avec ses toiles d’araignée.

Mais aussi je m’inspire tout particulièrement des civilisations précolombiennes comme les broderies Paracas, les tissages Nazca, et les bijoux Mochicas. Côté scientifique, Je m’intéresse au travail du neuroscientifique Ramon y Cajal,  le naturaliste Albertus Seba et Ernst Haeckel.

Je m’intéresse aussi au travail d’Arthur Bispo do Rosario, artiste Brésilien qui faisait des broderies étonnantes avec les matériaux qui tombaient sous ses mains, Mona Hatom, Pierrette Bloch et Giuseppe Penone.


Site Internet – ile-moulinsart.fr
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